Comment traquer les faux C.V ?

Faux diplômes, dates arrangées, intitulés de postes surdimensionnés, la triche sur un C.V. prend plusieurs formes. Internet a facilité la production des faux diplômes.


La nouvelle a vite fait le tour du monde. Le patron de Yahoo, l’un des plus importants sites d’information et de recherche, aurait falsifié son CV. Une fâcheuse tricherie qui l’a obligé à démissionner au bout de cinq mois de présidence. Pire, un autre haut cadre de la même boîte aurait connu le même sort quelques jours plus tard, toujours pour la même raison. Cas identique cette fois-ci en France où un ex-patron d’un aéroport aurait présenté un CV bidon. Il aurait prétendu être titulaire d’un diplôme d’ingénierie de la navigation aérienne alors qu’il ne l’avait jamais obtenu. Bien qu’il ait accompli son travail remarquablement durant quelques mois d’activité, il a été tout de même licencié pour faute grave.
Ces exemples sont loin d’être anecdotiques. Selon Chantal Aounil, consultante chez Bil Consulting, 80% des CV contenus dans la cvthèque du cabinet ont subi forcément un lifting. Cela va de l’omission à l’enjolivement en passant par les fausses déclarations, si le candidat est quasiment certain que les vérifications s’avèreront impossibles ou très difficiles à faire.

Nombreux sont les candidats qui succombent à ces pratiques. Or, les tricheries n’échappent pas aux recruteurs aguerris, même s’il leur arrive d’accorder des circonstances atténuantes pour certains écarts. L’existence d’un doute sur la véracité des informations transmises est pardonnable, si le candidat joue la carte de la transparence en entretien. Très souvent, il peut s’agir de petits arrangements avec la réalité. Par exemple, le cursus a bien été suivi, mais n’a pas été couronné par un diplôme. Ainsi une mention du genre «Ancien élève» d’une telle école peut signifier que l’intéressé a fréquenté l’école mais n’a jamais réussi l’examen final ou a été viré avant terme. Le candidat peut aussi mentionner le nom d’une grande école étrangère alors qu’il s’agit d’une formation délocalisée. Il arrive que des trous soient laissés volontairement dans le parcours professionnel ou scolaire. «Manquer de précisions sur les dates pour masquer une période de chômage n’est pas grave si on est sincère sur les raisons», explique Chantal Aounil.

En revanche, la mention d’un faux diplôme est préjudiciable au candidat. Le subterfuge est pourtant courant. Avec le développement de l’internet, aucun pays n’y échappe. Une multitude de sites, généralement hébergés dans les pays asiatiques, proposent des diplômes de toutes les grandes universités du monde. Mais le problème est tel que les recruteurs sont extrêmement pointilleux sur ce sujet et n’hésitent pas à appeler les écoles citées pour authentifier les documents fournis. Difficile donc de passer entre les filets s’il s’agit de grandes écoles parce qu’il y va de leur prestige.

Tous les lauréats sont donc minutieusement répertoriés. Le seul problème dans ce cas est que certaines entreprises ne prennent pas la peine de procéder aux vérifications d’usage quand elles recrutent directement pour des postes non stratégiques. Younes Mouhib, DG du cabinet Positif conseil, assure même que 75% des entreprises de la place ne vérifient pas les informations qu’on leur communique sur un CV. Mais souvent, il s’agit de postes non stratégiques.
Paradoxalement, la fraude s’intensifie à mesure que l’on monte dans la hiérarchie, souligne Mme Aounil. «Les CV améliorés se constatent principalement pour des postes de cadres, parfois même pour des postes de direction. Souvent, ils sont dans une logique de compétition, de quête de nouveaux challenges et, du coup, ils n’hésitent pas à gonfler ou à enjoliver leur CV», explique-t-elle. Ce faisant, il est tentant de fabuler sur l’expérience. «C’est la partie du CV la plus facile à enjoliver», note Mohamed Benouarrek, DRH de Promamec. «Une mission réalisée entre 2003 et 2005 peut durer deux ans comme quelques semaines. Les candidats rallongent souvent les dates pour masquer les périodes d’inactivité», précise-t-il.

Il est difficile de cacher indéfiniment les supercheries

Les artifices sont extrêmement nombreux. Mme Aounil met aussi l’accent sur les approximations des intitulés du poste. «Certains mentionnent toutes les attributions d’un descriptif de poste sans pour autant réaliser toutes les tâches conséquentes», précise-t-elle. Par exemple, il n’est pas rare qu’un responsable RH se fasse passer pour un DRH tout comme un chef de produit pour un directeur commercial.

Les langues sont aussi un facteur important à surveiller. Les candidats ont souvent l’habitude de mentionner «Anglais : parlé couramment». Dans un pareil cas, la question peut être réglée très rapidement lors de l’entretien. Si le recruteur comprend la langue mentionnée, il peut en user au beau milieu de l’entretien. Si cette langue est indispensable pour le poste, il sera possible de se faire aider d’un professionnel. Dans une discussion à bâtons rompus, il sera impossible de se dérober.
Pour montrer sa capacité à travailler en équipe, le candidat peut subitement devenir un pratiquant de sport collectif (football, rugby, volet ou handball) quand d’autres mettent en avant leur endurance et leur pugnacité en mentionnant dans leur CV le marathon ou des sports de combat.

Tout cela relève de la témérité. Parce que pour peu que le recruteur prenne la précaution de faire un minimum d’investigation, les forfaits sont vite débusqués. D’ailleurs, une des précautions d’usage qui devient courante est de demander des références afin de contacter d’anciens employeurs. Les coups de fil aux précédents employeurs sont également fréquents, tout comme les échanges avec d’anciens supérieurs ou collègues du candidat. Les fraudeurs sont donc prévenus. Surtout qu’il est difficile de cacher indéfiniment les supercheries.


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Brahim Habriche.

Lavieeco.com

Publié le 30 mai 2012.

Mis en ligne le 9 août 2012.