Cinq trucs infaillibles pour prendre la parole avec brio
15 Février 2008
Lu par 2113 personne(s)
Une réunion loupée, c'est non seulement du temps perdu mais aussi des salariés démotivés. L'Entreprise a demandé à des professionnels de dévoiler leurs « ficelles », celles qui font un tabac.
Pour ne plus jamais infliger à votre auditoire une réunion aussi « rasoir » que celles que vous avez subies tant de fois, lisez ce qui suit. Des pros de la communication nous ont expliqué comment faire pour démarrer une intervention en fanfare. Exit l'improvisation. Une ouverture de discours requiert autant de préparation que celle d'un one-man-show avant le lever de rideau.
Pour réussir le lancement d'une réunion vous n'avez que deux minutes : les deux premières. Si les participants décrochent, c'est fichu ! Ce moment fatidique doit donc les convaincre qu'ils s'apprêtent à vivre un moment important, dynamisant, instructif, voire amusant et agréable.
Tout un art !
1. Créer la complicité avec son auditoire
Un directeur logistique, soucieux d'exposer une situation complexe à des néophytes, démarra avec cette analogie : « Vous avez déjà été coincé dans les bouchons sur le périphérique. Vous vous êtes sans doute demandé pourquoi cela bloquait puis redevenait fluide et s'immobilisait à nouveau. Ce qui se passe dans nos entrepôts aujourd'hui, c'est la même chose. » Rien de tel qu'une métaphore tirée du quotidien ou qu'une anecdote personnelle pour se mettre à la portée de tous. « C'est une règle d'or pour focaliser l'attention », souligne Catherine Sorzana, formatrice spécialisée en communication orale. Dans le même registre, vous pouvez jouer la carte des affinités. Succès garanti si vous identifiez le bon atome crochu avec votre public. « Qui joue au golf dans cette salle ? » demande, un club à la main, Frédérick Lecoq, directeur marketing de LG, à une assemblée de Coréens. Un tiers des doigts se lève. Il enchaîne : « Qui est bon au golf ? » La moitié baisse la main. « Tout bon golfeur sait que la phase de montée du club est aussi importante que la descente. Idem en marketing. La préparation en amont détermine autant le succès d'une opération que son exécution. »
Autre approche : l'autodérision. Mais votre légitimité dans l'entreprise doit être suffisamment bien établie pour vous éviter d'être la risée de tous. « J'avais, comme toujours, écrit à la virgule près les quatre pages de mon discours, entame un manager habituellement froid et rigide. Mais j'ai changé d'avis cette nuit. Pour une fois, j'ai décidé de me lancer sans filet. » Cet aveu lui valut l'attention bienveillante de son auditoire, rapporte Nathalie Bouscass, consultante en management à la Cegos.
2. Jouer l'humour, mais avec finesse
Les Anglais font figure d'experts en la matière. C'est dans leurs gènes. La préparation de leur discours se concentre sur la blague d'introduction. Mais faites attention à votre public et aux différences culturelles si vous tentez cet exercice délicat. Un Américain a projeté à un auditoire français une photographie de son couple en maillot de bain sur la plage... Ce fut un bide, alors que ses compatriotes auraient adoré.
Laissez au placard les blagues Carambar et inspirez-vous de la finesse de Thierry Breton. Sa métaphore pour expliquer aux étudiants de Sciences-Po ce qu'est l'économie de l'immatériel est un cas d'école. Une riche Américaine entre dans la boutique Christian Dior de la 5e Avenue et demande à voir la collection de bibis. Stupeur, il n'y en a plus ! Christian Dior, qui se trouve là, s'avance vers elle muni d'un morceau d'étoffe rouge et d'épingles à cheveux et lui confectionne un magnifique bandeau, artistement élaboré et sophistiqué.
« Je vous dois combien ? s'enquiert la cliente.
- 1 500 dollars, répond le maître.
- 1 500 dollars pour un bout de tissu et trois épingles ? »
Le couturier, furieux, retire le tout et tend à sa cliente un carton à chapeau où il jette pêle-mêle le matériel.
« Cadeau de la maison ! Au revoir, madame ! »
« L'immatériel, c'est ça », conclut Thierry Breton. Les étudiants de Sciences-Po n'ont plus besoin qu'on leur fasse un dessin...
3. Jouer le sensationnel, l'inattendu, la provocation
« Le directeur d'un groupe informatique ouvrait toujours ses réunions en annonçant que sa décision était déjà prise ! », se souvient Patrice Stern, professeur à l'ESCP-EAP. Une telle déclaration a certes pu intriguer les participants, mais elle empêchait implicitement toute discussion. Débutez plutôt votre intervention par une annonce sensationnelle du type : « Cette année, nos ventes ont progressé de 20 % ! » Une telle entrée en matière requinquera l'auditoire, à condition que les chiffres soient les bons.
Dans un style plus littéraire, utilisez LA citation qui colle avec le thème du jour. Luc Teyssier, de Pygmalion Communication, conseille de l'écrire au tableau de papier pour la lire à voix haute, puis de laisser chacun méditer et, enfin, s'exprimer dessus.
Plus originale, l'introduction de Marcel Ducellier, directeur des ventes et des grands comptes chez Still, destinée à faire passer l'idée de différenciation : « J'ai dessiné une orange bleue, puis j'ai raconté l'histoire de la maîtresse d'école s'adressant ainsi à ses élèves : "Aujourd'hui, je vais promouvoir l'un d'entre vous. Dessinez-moi une orange." Sur les 30 élèves, 29 font un fruit orange et un seul une orange bleue. Il est le lauréat. » Depuis, l'orange bleue est devenue le symbole de la philosophie commerciale de Still.
4. Organiser et jouer une petite mise en scène
Incarner James Bond le temps d'une réunion... vous n'y auriez pas pensé. Un directeur commercial a tenté le coup lors d'une convention avec sa nouvelle force de vente. Il est arrivé en smoking, escorté de la directrice marketing déguisée en Lara Croft, avec en fond sonore la BO du célèbre agent 007. Ce culot lui a valu les applaudissements de la salle, conquise avant même qu'il ait parlé !
Autre champion de la scène : Steve Ballmer, PDG de Microsoft. Ses apparitions sur fond de musique tonitruante rappellent les concerts de Madonna. « J'ai quatre mots à vous dire, hurle-t-il : I - love - this - company ! [J'aime cette entreprise !] »
Etre le spectacle, c'est le concept proposé par Luc Teyssier lors de ses formations en entreprise. Il s'est inspiré de son expérience acquise auprès de comédiens et de metteurs en scène. « Prendre du plaisir est un bon moyen d'en donner », affirme-t-il. A défaut de talent, faites appel à des professionnels. Le comité de direction de NRG France a ainsi embauché une équipe de la Ligue d'improvisation pour mettre en scène son nouveau directeur financier. Un acteur a joué le rôle du prétendant au poste, dont le discours surréaliste a effrayé toute la salle, avant qu'elle ne s'aperçoive de la supercherie. Bonne nouvelle : ce genre de prestation reste abordable avec un budget moyen à partir de 2 000 euros.
5. Dérouter l'auditoire ou le manipuler
François-Xavier Demaison, fiscaliste international devenu humoriste, nous propose l'une de ses techniques d'artiste qu'il appliquerait pour dérouter ses auditeurs lors d'une réunion : « Je démarrerais normalement, en partant d'une situation plausible, pour aller vers des choses de plus en plus absurdes. Toujours sur le même ton sérieux, jusqu'à ce que l'auditoire réalise l'invraisemblance de mes propos. »
« Fin manipulateur, le dirigeant d'une grande entreprise avait l'habitude de faire ses réunions sans chaise dans la salle ! Tout le monde restait debout », raconte Patrice Stern, expert en management. Un bon moyen de maintenir les gens éveillés. « Un autre, ajoute-t-il, ouvrait grand les fenêtres en plein hiver avec interdiction de les fermer. » Une pratique digne des méthodes totalitaires. Sans aller jusque-là, prenez-en de la graine !
mis en ligne le 13 février 2008
L’entreprise
Pour ne plus jamais infliger à votre auditoire une réunion aussi « rasoir » que celles que vous avez subies tant de fois, lisez ce qui suit. Des pros de la communication nous ont expliqué comment faire pour démarrer une intervention en fanfare. Exit l'improvisation. Une ouverture de discours requiert autant de préparation que celle d'un one-man-show avant le lever de rideau.
Pour réussir le lancement d'une réunion vous n'avez que deux minutes : les deux premières. Si les participants décrochent, c'est fichu ! Ce moment fatidique doit donc les convaincre qu'ils s'apprêtent à vivre un moment important, dynamisant, instructif, voire amusant et agréable.
Tout un art !
1. Créer la complicité avec son auditoire
Un directeur logistique, soucieux d'exposer une situation complexe à des néophytes, démarra avec cette analogie : « Vous avez déjà été coincé dans les bouchons sur le périphérique. Vous vous êtes sans doute demandé pourquoi cela bloquait puis redevenait fluide et s'immobilisait à nouveau. Ce qui se passe dans nos entrepôts aujourd'hui, c'est la même chose. » Rien de tel qu'une métaphore tirée du quotidien ou qu'une anecdote personnelle pour se mettre à la portée de tous. « C'est une règle d'or pour focaliser l'attention », souligne Catherine Sorzana, formatrice spécialisée en communication orale. Dans le même registre, vous pouvez jouer la carte des affinités. Succès garanti si vous identifiez le bon atome crochu avec votre public. « Qui joue au golf dans cette salle ? » demande, un club à la main, Frédérick Lecoq, directeur marketing de LG, à une assemblée de Coréens. Un tiers des doigts se lève. Il enchaîne : « Qui est bon au golf ? » La moitié baisse la main. « Tout bon golfeur sait que la phase de montée du club est aussi importante que la descente. Idem en marketing. La préparation en amont détermine autant le succès d'une opération que son exécution. »
Autre approche : l'autodérision. Mais votre légitimité dans l'entreprise doit être suffisamment bien établie pour vous éviter d'être la risée de tous. « J'avais, comme toujours, écrit à la virgule près les quatre pages de mon discours, entame un manager habituellement froid et rigide. Mais j'ai changé d'avis cette nuit. Pour une fois, j'ai décidé de me lancer sans filet. » Cet aveu lui valut l'attention bienveillante de son auditoire, rapporte Nathalie Bouscass, consultante en management à la Cegos.
2. Jouer l'humour, mais avec finesse
Les Anglais font figure d'experts en la matière. C'est dans leurs gènes. La préparation de leur discours se concentre sur la blague d'introduction. Mais faites attention à votre public et aux différences culturelles si vous tentez cet exercice délicat. Un Américain a projeté à un auditoire français une photographie de son couple en maillot de bain sur la plage... Ce fut un bide, alors que ses compatriotes auraient adoré.
Laissez au placard les blagues Carambar et inspirez-vous de la finesse de Thierry Breton. Sa métaphore pour expliquer aux étudiants de Sciences-Po ce qu'est l'économie de l'immatériel est un cas d'école. Une riche Américaine entre dans la boutique Christian Dior de la 5e Avenue et demande à voir la collection de bibis. Stupeur, il n'y en a plus ! Christian Dior, qui se trouve là, s'avance vers elle muni d'un morceau d'étoffe rouge et d'épingles à cheveux et lui confectionne un magnifique bandeau, artistement élaboré et sophistiqué.
« Je vous dois combien ? s'enquiert la cliente.
- 1 500 dollars, répond le maître.
- 1 500 dollars pour un bout de tissu et trois épingles ? »
Le couturier, furieux, retire le tout et tend à sa cliente un carton à chapeau où il jette pêle-mêle le matériel.
« Cadeau de la maison ! Au revoir, madame ! »
« L'immatériel, c'est ça », conclut Thierry Breton. Les étudiants de Sciences-Po n'ont plus besoin qu'on leur fasse un dessin...
3. Jouer le sensationnel, l'inattendu, la provocation
« Le directeur d'un groupe informatique ouvrait toujours ses réunions en annonçant que sa décision était déjà prise ! », se souvient Patrice Stern, professeur à l'ESCP-EAP. Une telle déclaration a certes pu intriguer les participants, mais elle empêchait implicitement toute discussion. Débutez plutôt votre intervention par une annonce sensationnelle du type : « Cette année, nos ventes ont progressé de 20 % ! » Une telle entrée en matière requinquera l'auditoire, à condition que les chiffres soient les bons.
Dans un style plus littéraire, utilisez LA citation qui colle avec le thème du jour. Luc Teyssier, de Pygmalion Communication, conseille de l'écrire au tableau de papier pour la lire à voix haute, puis de laisser chacun méditer et, enfin, s'exprimer dessus.
Plus originale, l'introduction de Marcel Ducellier, directeur des ventes et des grands comptes chez Still, destinée à faire passer l'idée de différenciation : « J'ai dessiné une orange bleue, puis j'ai raconté l'histoire de la maîtresse d'école s'adressant ainsi à ses élèves : "Aujourd'hui, je vais promouvoir l'un d'entre vous. Dessinez-moi une orange." Sur les 30 élèves, 29 font un fruit orange et un seul une orange bleue. Il est le lauréat. » Depuis, l'orange bleue est devenue le symbole de la philosophie commerciale de Still.
4. Organiser et jouer une petite mise en scène
Incarner James Bond le temps d'une réunion... vous n'y auriez pas pensé. Un directeur commercial a tenté le coup lors d'une convention avec sa nouvelle force de vente. Il est arrivé en smoking, escorté de la directrice marketing déguisée en Lara Croft, avec en fond sonore la BO du célèbre agent 007. Ce culot lui a valu les applaudissements de la salle, conquise avant même qu'il ait parlé !
Autre champion de la scène : Steve Ballmer, PDG de Microsoft. Ses apparitions sur fond de musique tonitruante rappellent les concerts de Madonna. « J'ai quatre mots à vous dire, hurle-t-il : I - love - this - company ! [J'aime cette entreprise !] »
Etre le spectacle, c'est le concept proposé par Luc Teyssier lors de ses formations en entreprise. Il s'est inspiré de son expérience acquise auprès de comédiens et de metteurs en scène. « Prendre du plaisir est un bon moyen d'en donner », affirme-t-il. A défaut de talent, faites appel à des professionnels. Le comité de direction de NRG France a ainsi embauché une équipe de la Ligue d'improvisation pour mettre en scène son nouveau directeur financier. Un acteur a joué le rôle du prétendant au poste, dont le discours surréaliste a effrayé toute la salle, avant qu'elle ne s'aperçoive de la supercherie. Bonne nouvelle : ce genre de prestation reste abordable avec un budget moyen à partir de 2 000 euros.
5. Dérouter l'auditoire ou le manipuler
François-Xavier Demaison, fiscaliste international devenu humoriste, nous propose l'une de ses techniques d'artiste qu'il appliquerait pour dérouter ses auditeurs lors d'une réunion : « Je démarrerais normalement, en partant d'une situation plausible, pour aller vers des choses de plus en plus absurdes. Toujours sur le même ton sérieux, jusqu'à ce que l'auditoire réalise l'invraisemblance de mes propos. »
« Fin manipulateur, le dirigeant d'une grande entreprise avait l'habitude de faire ses réunions sans chaise dans la salle ! Tout le monde restait debout », raconte Patrice Stern, expert en management. Un bon moyen de maintenir les gens éveillés. « Un autre, ajoute-t-il, ouvrait grand les fenêtres en plein hiver avec interdiction de les fermer. » Une pratique digne des méthodes totalitaires. Sans aller jusque-là, prenez-en de la graine !
mis en ligne le 13 février 2008
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